Le recours pour excès de pouvoir
Auteur: giscardtchioffo / Kontchou Brain Trust Law Chambers
Le recours pour excès de pouvoir est l’un des recours […]
Le recours pour excès de pouvoir est l’un des recours contentieux prévus en droit administratif camerounais. Il a pour but de contester la légalité d’un acte administratif. Le recourant sollicite que le juge administratif puisse annuler l’acte pris par l’autorité administrative, motif pris de ce que cet acte est illégal. Comme l’a clairement affirmé la Chambre Administrative de la Cour Suprême du Cameroun dans l’affaire MONKAM TIENTCHEU David, ce recours est ouvert en vertu d’un principe général de droit d’après lequel toute décision administrative peut faire l’objet de recours devant le juge administratif. En effet, « (…) Il a été jugé que même dans l’hypothèse où une loi dispose qu’un acte donné ne peut faire l’objet d’aucun recours administratif ou judiciaire ; cette disposition ne saurait être interprétée comme excluant le recours pour excès de pouvoir qui est ouvert même sans texte contre tout acte administratif et qui a pour effet d’assurer conformément aux principes généraux de droit de légalité » (CS/CA, jugement n°40 du 29 mai 1980).
Le contenu de l’excès de pouvoir est clairement indiqué par l’article 2 alinéa 3 de la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs. Sont constitutifs d’excès de pouvoir au regard de ce texte : le vice de forme ; l’incompétence ; la violation d’une disposition légale ou réglementaire et le détournement de pouvoir. On comprend donc qu’il existe des irrégularités formelles et les irrégularités matérielles.
Les irrégularités formelles sont constituées du vice de forme et de procédure, et de l’incompétence. Le vice de forme et de procédure sont des irrégularités de l’acte administratif unilatéral. Alors que le vice de forme se rapporte au défaut lié à la présentation matérielle de l’acte, le vice de procédure quant à lui se réfère au défaut lié à l’élaboration de l’acte. La jurisprudence les emploie indifféremment en faisant plutôt la distinction entre formalités substantielles et formalités non substantielles. S’agissant des formalités substantielles on peut citer le principe du contradictoire dont l’inobservation vicie la régularité de l’acte qui en court ainsi nullité pour excès de pouvoir (voir Jugement n° 38/CS/CA/84/85 du 04 mars 1985, NYAM Charles c/ Etat du Cameroun (MINESUP). En ce qui concerne à la formalité non substantielle, tel le visas le non accomplissement ne vicie pas la régularité (voir Arrêt n°55/CFJ/SCAY/ du 25 mars 1969, EMINI TINA Etienne c/ Etat du Cameroun oriental ; arrêt n°56/CFJ/SCAY du 25 mars 1969 ELANGA Gilbert c/ Etat du Cameroun oriental ; arrêt n°60/CFJ/SCAY du 25 mars 1969, MBARGA ZAMBO Maurice c/ Etat du Cameroun oriental ; arrêt n°65/CFJ/SCAY du 30 septembre 1969, EVINA ADA Christophe c/ Etat du Cameroun oriental). L’incompétence, fait référence à l’inaptitude légale d’une autorité administrative à accomplir un acte. Elle concerne l’organe, la matière, le lieu et le temps. Cela dit, la violation de l’un de ces éléments par l’administration est susceptible de vicier la régularité de l’acte en cause qui encourt alors annulation pour excès de pouvoir. C’est ce qu’a en effet décidé le juge administratif dans l’affaire NDJOCK Paul c/ Administration du Territoire (CCA, arrêt n° 678 du 27 décembre 1957, Ndjock Paul c/ Administration du Territoire).
Les irrégularités matérielles peuvent être constituées de la violation d’une disposition légale ou règlementaire et du détournement de pouvoir. La violation d’une disposition légale ou règlementaire consiste pour l’agent public à enfreindre l’une ou l’autre dans son acte. La violation peut concerner la constitution (CS/CA, jugement n°07/94-95 du 27 octobre 1994, Dame NDONGO née MBONZI NGOMBO c/ Etat du Cameroun (P.R) ; CS/CA, jugement N°43/82-83 du 7 avril 1983, KOUOH Emmanuel Christian c/ Etat du Cameroun), la loi (CS/CA, jugement N°62/79-80 du 25 septembre 1980, société « Assureurs Conseils Franco-Africains » c/ Etat du Cameroun (MINFI) ; Arrêt n° 34/CFJ/SCAY du 30 avril 1968, TOKO Daniel / Etat fédéré du Cameroun oriental.) ou un règlement (Arrêt n° 34/CFJ/SCAY du 30 avril 1968, TOKO Daniel/ Etat fédéré du Cameroun oriental). Le détournement de pouvoir consiste en l’usage des pouvoirs administratifs à des fins autres que l’intérêt général (Arrêt n°120/CFJ/CAY du 08 décembre 1970, BILAE Jean c/ Etat du Cameroun). Il peut viser à nuire à l’administré (Arrêt n° 40/CFJ/SCAY du 30 avril 1968, BABA Youssoufa c/ Etat du Cameroun oriental) ou le détournement de l’intérêt général au profit des intérêts particuliers (Arrêt n°160/CFJ/CAY du 08 juin 1971, FOUDA MBALLA Maurice c/ Etat du Cameroun oriental ; Jugement n° 60/CS/CA/99-2000 du 29 juin 2000, Madame POHOKAM Suzanne c/ Etat du Cameroun).