Le contentieux de la légalité des actes communautaires

Auteur: giscardtchioffo / Kontchou Brain Trust Law Chambers

Un acte communautaire peut faire l’objet de contentieux, notamment de […]

Un acte communautaire peut faire l’objet de contentieux, notamment de contentieux de la légalité ou d’appréciation de validité. Ce type de contentieux vise à censurer la violation de la législation communautaire (articles 8 et 9 de l’acte additionnel n° 03/21 du 05 octobre 2021 portant règlement de procédure de la Cour de justice communautaire). La violation peut consister en un manquement des Etats membres aux obligations leur incombant en vertu du Traité de la CEMAC et des textes subséquents. Il peut aussi consister en une carence des institutions, des Organes et Institutions Spécialisées aux obligations qui leur incombent en vertu des actes de la Communauté (articles 24 de la Convention du 30 janvier 2009 régissant la Cour de justice de la CEMAC et 9 de l’acte additionnel n° 03/21 du 05 octobre 2021 portant règlement de procédure de la Cour de justice communautaire).                                                                                                

En l’espèce, le recours peut être direct ou indirect. S’agissant tout d’abord du recours direct, les articles 24 de la Convention du 30 janvier 2009 régissant la Cour de justice de la CEMAC et 9 de l’acte additionnel n° 03/21 du 05 octobre 2021 portant règlement de procédure de la Cour de justice communautaire précisent : « la Cour connaît, sur recours de tout Etat membre, de toute Institution, Organe ou Institution Spécialisée de la CEMAC ou de toute personne physique ou morale qui justifie d’un intérêt certain et légitime, de tous les cas de violation des dispositions du Traité de la CEMAC et des textes subséquents. Toute partie peut, à l’occasion d’un litige, soulever l’exception d’illégalité d’un acte juridique d’un Etat membre, d’une Institution, d’un Organe ou d’une Institution Spécialisée ». Dans le cas du recours indirect, la nécessité d’un recours en appréciation de la légalité d’un acte communautaire peut s’imposer dans le cadre d’une procédure judiciaire nationale dans laquelle le droit communautaire est invoqué. Ainsi, l’appréciation de la légalité sera faite dans le cadre d’un renvoi préjudiciel du juge national saisi vers le juge communautaire. En effet, il est dit aux articles 26 de la Convention du 30 janvier 2009 régissant la Cour de justice de la CEMAC et 10 de l’acte additionnel n° 03/21 du 05 octobre 2021 portant règlement de procédure de la Cour de justice communautaire que  « la Cour statue à titre préjudiciel sur l’interprétation du Traité de la CEMAC et des textes subséquents, sur la légalité et l’interprétation des actes des Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la CEMAC, quand une juridiction nationale ou un organisme à fonction juridictionnelle est appelé à en connaitre à l’occasion d’un litige. En outre, chaque fois qu’une juridiction nationale ou un organisme à fonction juridictionnelle saisi des questions de droit ci-dessus doit statuer en dernier ressort, il est tenu de saisir préalablement la Cour de Justice. Cette saisine devient facultative lorsque la juridiction nationale ou l’organisme à fonction juridictionnelle doit statuer à charge d’appel ».

Quoi qu’il en soit, le législateur communautaire a prévu et organisé la procédure contentieuse de la légalité sous deux angles : le contentieux en matière de manquement (1) et le contentieux en matière de carence (2).

    1- Le contentieux en matière de manquement

Il organisée par l’article 139 de l’acte additionnel n° 03/21 du 05 octobre 2021 portant règlement de procédure de la Cour de justice communautaire.  Il y est dit que si un Etat membre manque à ses obligations et partant viole le Traité de la CEMAC, les conventions subséquentes et le droit communautaire CEMAC, les autres Etats membres et les Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la Communauté ainsi que toute personne physique ou morale ayant un intérêt à agir peuvent saisir la Commission pour le déclenchement de la procédure de constatation du manquement par la Cour de Justice Communautaire.

Mais, un tel recours n’est recevable que si la commission de la CEMAC a préalablement adressé un rapport dans ce sens au Conseil des Ministres, qui dispose lui-même d’un délai de deux mois pour se prononcer sur ce rapport. En cas de silence, à l’expiration dudit délai, le Président de la Commission saisit la Cour de Justice aux fins de faire constater le manquement et de prononcer les sanctions.

La Cour va donc apprécier et, si elle constate une violation des dispositions du Traité de la CEMAC et des textes subséquents, elle déclare l’acte attaqué non-conforme. Cette censure prend la forme de l’annulation de l’acte communautaire attaqué (Voir ARRÊT N°003/CJ/CEMAC/CJ/08 du 20/11/2008, Aff.: MOKAMANEDE John Wilfrid C/ Commission CEMAC : Annulation d’une décision du Conseil des ministres de l’UEAC excluant un fonctionnaire du corps des fonctionnaires de l’EIED, illégalité tirée de l’incompétence du Conseil des ministres à prononcer l’exclusion de ce fonctionnaire ; ARRET N° 010/CJ/CEMAC/CJ/09 DU 13/11/2009 ; Affaire : SIELIENOU Christophe et Autres C/ Décision COBAC N° 2008/52 – Amity Bank Cameroon PLC – Autorité Monétaire du Cameroun : illégalité de la décision COBAC portant nomination d’un mandataire, la Convention de la COBAC prévoyant la désignation d’un administrateur provisoire ou d’un liquidateur).

L’annulation peut être totale ou partielle, et ne porter que sur la partie illégale de l’acte communautaire en cause (Voir ARRÊT N°003lCJ/CEMAC/CJ/03 Du 03/07/2003, Affaire: TASHA LOWEH Lawrence C/ Décision COBAC D-2000/22, et – Amity Bank Cameroon PLC, dans laquelle le juge annule la décision COBAC attaquée sur le seul point de la démission d’office du Président du conseil d’administration, que la COBAC n’a pas le pouvoir de démettre de ses fonctions, maintenant la décision sur le point de la démission d’office le Directeur Général d’Amity Bank, selon les pouvoirs que lui confère la Convention la régissant).

    1- Le contentieux en matière de carence

Sa procédure est organisée par les articles 140 à 141 du règlement de procédure précité. Dans le cas où, en violation du Traité de la CEMAC, des conventions subséquentes et du droit communautaire CEMAC, l’institution, l’Organe et l’Institution Spécialisée compétente manque à ses obligations, les Etats membres et les autres Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la Communauté peuvent saisir la Cour de Justice Communautaire en vue de faire constater la carence.

La recevabilité de ce recours est conditionnée par un recours préalablement fait à l’Institution, l’Organe et l’Institution spécialisée d’agir restée deux mois sans effet compter de cette invitation. Ainsi, dans un nouveau délai de deux mois, toute personne physique ou morale pourra saisir la Cour pour faire grief à l’une des Institutions, Organes et Institutions Spécialisées compétents de la Communauté d’avoir manqué de lui adresser un acte autre qu’une recommandation ou un avis. Lorsque, suite à son appréciation, la Cour constate la carence, L’Institution, l’Organe et l’Institution Spécialisée dont la carence est constatée, est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour de Justice Communautaire. Cette obligation ne préjuge pas de la responsabilité contractuelle de la Communauté qui est régie par la loi applicable au contrat.