LE NANTISSEMENT DU FONDS DE COMMERCE : UNE TECHNIQUE D’ACCES AU CREDIT A LA DISPOSITION DU CHEF D’ENTREPRISE

Auteur: giscardtchioffo / Kontchou Brain Trust Law Chambers

Le fonds de commerce, comme nous l’avons vu dans la […]

Le fonds de commerce, comme nous l’avons vu dans la précédente publication, est un ensemble de biens mobiliers affectés à l’exercice d’une activité commerciale. Il s’agit donc d’un bien qui peut faire l’objet de nantissement. Le nantissement du fonds de commerce est la convention par laquelle le constituant affecte en garantie d’une obligation, les éléments incorporels constitutifs du fonds de commerce. Le chef d’entreprise peut alors le donner en garantie du paiement d’un crédit : c’est une forme de gage sans dépossession.

  1. Quels sont les éléments du fonds de commerce sur lesquels peut porter le nantissement ?

Il s’agit ici de voir le contenu de l’assiette du nantissement d’un fonds de commerce. On peut distinguer les éléments qui doivent obligatoirement y figurer et les éléments facultatifs.

Relativement aux éléments obligatoires, il s’agit, selon l’article 162 al. 1 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés, de la clientèle, de l’enseigne et du nom commercial. Pour ce qui est des éléments facultatifs, cette catégorie englobe les éléments incorporels et les éléments corporels. S’agissant tout d’abord des éléments incorporels, l’article 162 al. 2 de l’Acte uniforme précité indique que « le nantissement peut aussi porter sur les autres éléments incorporels du fonds de commerce tels que le droit au bail commercial, les licences d’exploitation, les brevets d’invention, marques de fabrique et de commerce, dessins et modèles et autres droits de la propriété intellectuelle ».

S’agissant des éléments corporels ensuite, ils concernent essentiellement le matériel professionnel. On peut citer : les outillages, installations, aménagements et agencements, machines, matériaux, mobiliers qui ne représentent pas les marchandises. Toutefois, cette extension du nantissement doit faire l’objet d’une clause spéciale désignant les éléments engagés et d’une mention particulière au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier. Cette clause n’a d’effet que si les formalités de publicité ont été satisfaites. Si le nantissement porte sur un fonds de commerce et ses succursales, celles-ci doivent être désignées par l’indication précise de leur siège.

Sont exclus du nantissement du fonds de commerce les marchandises. Le nantissement ne peut également porter sur les droits réels immobiliers conférés ou constatés par des baux ou des conventions soumises à inscription au registre de la publicité immobilière.

  1. Quelles sont les formalités attachées au nantissement d’un fonds de commerce ?

Les formalités dépendent selon qu’il s’agit d’un nantissement conventionnel ou d’un nantissement judiciaire.

Le nantissement conventionnel résulte d’un accord passé entre le créancier et le constituant de la sûreté. Cette forme de nantissement doit se faire par acte authentique ou sous seing privé dûment enregistré. A peine de nullité, le nantissement du fonds de commerce doit être constaté dans un écrit contenant les mentions suivantes : ·  1° la désignation du créancier, du débiteur et du constituant du nantissement si celui-ci n’est pas le débiteur ; ·  2° la désignation précise et le siège du fonds et, s’il y a lieu, de ses succursales ; ·  3° les éléments du fonds nanti ; ·  4° les éléments permettant l’individualisation de la créance garantie tels que son montant ou son évaluation, sa durée et son échéance.

La juridiction compétente peut autoriser le créancier à prendre une inscription de nantissement sur le fonds de commerce de son débiteur : il s’agit du nantissement judiciaire évoqué plus haut. Cette forme de nantissement est régie par les dispositions relatives à la saisie conservatoire des titres sociaux réglementée par les dispositions de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.

Quelle que soit la forme de nantissement, elle n’est opposable aux tiers que s’il est inscrit au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier.

  1. Quelles sont les effets du nantissement du fonds de commerce ?

Le nantissement du fonds de commerce accorde des droits au profit du créancier inscrit : il s’agit du droit de préférence et du droit de suite. D’après l’article 178 al. 3 de l’Acte uniforme précité, le créancier nanti a sur le fonds de commerce un droit de préférence. C’est le droit pour lui d’être payé par préférence à tout autre sur le prix de la vente du fonds de commerce. Lorsque le créancier nanti est en présence des créanciers chirographaires il prime ces derniers. En cas de pluralité de créanciers nantis, chaque créancier exerce son droit de préférence dans l’ordre de l’inscription de son nantissement.

Le droit de suite du créancier nanti est le droit de saisir le fonds de commerce grevé en quelques mains qu’il se trouve, même entre les mains d’un tiers acquéreur. C’est dans ce sens que le droit lui offre le droit de réalisation et le droit de surenchère. Selon le droit de réalisation, le créancier nanti, faute de paiement et muni d’un titre exécutoire peut faire procéder à la vente forcée du fonds de commerce nanti, huit jours après une sommation faite au débiteur et, s’il y a lieu, au tiers constituant du nantissement dans les conditions prévues par les dispositions organisant les voies d’exécution auxquelles l’acte de nantissement ne peut y déroger. Dans ce cas, il exerce son droit de préférence sur le prix de la chose vendue. Conformément au droit de surenchère, c’est le droit pour le créancier inscrit de provoquer la mise aux enchères du fonds de commerce nanti en offrant de porter le prix principal.