Le recours contentieux des comptes

Auteur: giscardtchioffo / Kontchou Brain Trust Law Chambers

Les deniers publics doivent être utilisés avec beaucoup de précautions […]

Les deniers publics doivent être utilisés avec beaucoup de précautions car la faute de l’agent public peut être cruciale pour lui-même et/ou pour l’administration et partant pour la société toute entière.  En effet, l’utilisation des deniers publics ne peut se faire sans la police de l’Etat. Ainsi, lorsqu’à l’issue d’un contrôle des manquements sont observés, cela peut donner lieu à un contentieux. C’est dans ce sillage qu’il faudrait penser au contentieux des comptes.  Le contentieux des comptes s’inscrit dans l’ordre du contrôle de la gestion des comptes publics. Juridiquement un compte un ensemble d’écritures décrivant différentes opérations financières (encaissements, décaissements, mouvements d’administration du patrimoine ou mouvements de trésorerie) réalisés dans la gestion des fonds. Il devient public lorsque les écritures relatives aux opérations financières concernent la gestion des fonds, des deniers publics.

Le contentieux des comptes peut donc être compris comme un litige né de la manipulation inadéquate des derniers publics par les agents publics détenteur du pouvoir de manipulation de la chose publique. La faute peut dont faire l’objet d’un recours et notamment d’un recours contentieux des comptes. Le contentieux des comptes est de la compétence des juridictions des comptes.

A cet effet, le législateur camerounais prévu des juridictions inférieures que sont les tribunaux régionaux des comptes et une juridiction des comptes, notamment la chambre des comptes de la cour suprême dont le siège est à Yaoundé. Toutefois, bien que la loi n° 2006/017 du 29 décembre 2006 ait fixé l’organisation, les attributions et le fonctionnement les tribunaux régionaux des comptes, ces derniers ne sont pas encore en activité. Cela dit, le contentieux des comptes reste du domaine de la chambre des comptes de la Cour Suprême. Aux termes de l’article 41 de la constitution du Cameroun, la chambre des comptes de la Cour Suprême est compétente pour contrôler et statuer sur les comptes publics et ceux des entreprises publiques et para-publiques ; elle connait de toute autre matière qui lui est expressément attribuée par la loi. Ainsi, d’après les articles 2 et 7 de la loi de 2003 fixe les attributions, l’organisation et fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême, la Chambre des Comptes contrôle et juge les comptes ou les documents en tenant lieu des comptables publics patents ou de fait ; de l’Etat et de ses établissements publics ; des collectivités territoriales décentralisées et de leurs établissements publics ; des entreprises du secteur public et parapublic. Elle contrôle et juge les comptes des comptables publics, déclare et apure les comptabilités de fait, prononce les condamnations à l’amende.

Depuis la naissance des deux lois du 11 juillet 2018, notamment la loi n° 2018/011 du 11 juillet 2018 portant Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun et la loi n° 2018/012 du 11 juillet 20218 portant Régime financier de l’Etat et des autres entités publiques (respectivement article 42 et article 86), elle est compétente pour juger les ordonnateurs, les contrôleurs financiers et les comptables publics et sanctionner les fautes de gestion commises par les agents publics. Cela signifie comme vient de le rappeler une décision récente (CS/CC, 15 févr. 2024, n° 01/CDC/CSC/SR/DBF, Discipline Budgétaire et Financière, Commune de Ngomedzap.), que le Conseil de discipline et budgétaire et financier n’est plus compétent en la matière.

D’après l’article 113 de la constitution, la loi de 2006 portant organisation et fonctionnement de la cour suprême, la procédure à suivre devant la chambre des comptes en premier et en dernier ressort est celle applicable devant la chambre judiciaire de la cour suprême. Cela signifie que la chambre des comptes est saisie par déclaration faite au greffe. Mais la loi de 2003 fixant les attributions, l’organisation et le fonctionnement de la chambre des comptes de la cour suprême a prévu quelques spécificités en la matière que l’on peut retrouver en ses articles 27 et suivants. En tout état de cause cette chambre peut être saisie d’office notamment, par le comptable public, le ministre des finances, les représentants légaux des personnes morales publiques concernées, ou le Procureur Général près la Cour Suprême.