LE STATUT D’ENTREPRENANT DANS L’ESPACE OHADA : UN STATUT ATTRACTIF POUR STIMULER L’ENTREPRENARIAT

Auteur: giscardtchioffo / Kontchou Brain Trust Law Chambers

Lors de la réforme de l’Acte uniforme portant droit commercial […]

Lors de la réforme de l’Acte uniforme portant droit commercial général en 2010, le législateur a voulu formaliser l’économie informelle et stimuler l’entreprenariat à travers le statut de l’entreprenant en général. Il l’a défini comme « l’entrepreneur individuel, personne physique qui, sur simple déclaration (…) exerce une activité professionnelle, civile, commerciale, artisanale ou agricole ». Ce statut qui s’apparente à celui du micro-entrepreneur du droit français, doit être distingué de celui du commerçant, et de celui du salarié. Il concerne l’ensemble des acteurs qui exercent dans le secteur informel.

  1. Quelles sont les conditions d’acquisition du statut d’entreprenant ?

L’accès au statut d’entreprenant commence par l’accès dans le cadre de l’entreprenant qui est le réceptacle accueillant toute personne désirant avoir ce statut. La première condition à respecter par toute personne voulant accéder à ce statut est sa qualité de personne physique. Cette limitation du statut aux personnes physiques se comprend aisément : la totalité des personnes qui exercent dans le secteur informel sont des personnes physiques. Ce sont des jeunes qui n’ont pas pu aller à l’école, ce sont des diplômés sans emplois, ce sont des retraités, etc. Cette limitation a donc une finalité  incitative.

Le candidat doit également  être capable et n’être pas concerné par les interdictions. Aussi, il doit exercer l’une des activités prévues par l’Acte uniforme relatif au droit commercial général. Il s’agit de l’un des activités suivantes : commerciale, civile, artisanale, agricole, professionnelle.

L’autre condition et pas les moindres est la condition de forme liée à la déclaration d’activité au Registre de commerce et du crédit mobilier (RCCM). Ainsi, lorsqu’une personne désire acquérir le statut d’entreprenant, elle doit au préalable procéder à la déclaration d’activité au RCCM. L’entreprenant n’est pas assujetti à l’immatriculation au RCCM comme le commerçant, mais a une simple déclaration de son activité qui se fait toujours au RCCM. La simplification de la déclaration est perceptible tant au niveau des documents à fournir, qu’au niveau de la procédure. L’entreprenant déclare son activité, sans frais, au greffe de la juridiction compétente ou à l’organe compétent dans l’Etat Partie, dans le ressort duquel il exerce. Il fournit les éléments suivants : ·  1° noms et prénoms ; ·  2° adresse d’exercice de l’activité ; ·  3° description de l’activité ; ·  4° justificatif d’identité ; ·  5° éventuellement, justificatif du régime matrimonial. Il ne peut commencer son activité qu’après réception du  numéro de déclaration d’activité qu’il doit mentionner sur ses factures, bons de commande, tarifs et documents ou correspondances professionnels, suivi de l’indication du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier qui a reçu sa déclaration et de la mention « Entreprenant dispensé d’immatriculation ».

  1. Quelles sont les obligations de l’entreprenant ?

La personne qui a été reçue comme entreprenant  est désormais assujettie à des obligations dont quelques-unes sont de nature comptables, d’autres sans lien étroit avec la comptabilité. Relativement aux obligations de nature comptable, L’entreprenant est tenu d’établir, dans le cadre de son activité, au jour le jour, un livre mentionnant chronologiquement l’origine et le montant de ses ressources en distinguant les règlements en espèces des autres modes de règlement d’une part, la destination et le montant de ses emplois d’autre part. Ledit livre doit être conservé pendant cinq ans au moins. En outre, l’entreprenant qui exerce des activités de vente de marchandises, d’objets, de fournitures et denrées ou de fourniture de logement doit tenir un registre, récapitulé par année, présentant le détail des achats et précisant leur mode de règlement et les références des pièces justificatives, lesquelles doivent être conservées.

L’entreprenant qui n’a pas exécuté les obligations comptables édictées par la loi encourt des sanctions. L’accent est mis ici sur les sanctions pénales. A cet égard, l’Acte uniforme relatif au droit comptable énonce qu’encourt une sanction pénale les entrepreneurs individuels qui n’auront pas, pour chaque exercice social, dressé l’inventaire et établi les états financiers  annuels ainsi que, le cas échéant, le rapport de gestion et le bilan. Le même texte frappe ceux qui auront sciemment établi et communiqué des états financiers  ne délivrant pas une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’exercice. Conformément à la loi de 2003 relative à la répression des infractions contenues dans certains Actes uniformes, cette infraction est punie d’un emprisonnement de trois mois à trois ans et d’une amande de 500000 à 5000000 FCFA ou l’une de ces deux peines.

En ce qui concerne les autres obligations, elles sont diversifiées. Les obligations fiscales portent tant sur les impôts directs, que les impôts indirectes. L’entreprenant est soumis à la fiscalité sur les personnes physiques, notamment l’impôt sur les bénéfices artisanaux, industriels, commerciaux et agricoles. Il est également assujetti au régime de l’impôt libératoire selon son chiffre d’affaires, à la contribution à la patente et aux licences selon le cas. En ce qui concerne les obligations non-fiscales de l’entreprenant, elles sont également diversifiées. Elles concernent l’environnement, l’ordre public, la concurrence, la consommation et le travail.

  1. Dans quel cas peut-on perdre le statut d’entreprenant ?

L’entreprenant conserve son statut si le chiffre d’affaires annuel généré par son activité pendant deux exercices successifs n’excède pas les seuils fixés dans l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises au titre du système minimal de trésorerie. D’après l’article de l’Acte uniforme susmentionné, ces seuils sont de 30 millions pour les entreprises de négoces, de 20 millions pour les entreprises artisanales  et assimilées et de 10 millions pour les entreprises de services. Ce chiffre d’affaires annuel est en ce qui concerne les commerçants et les artisans, d’une part, celui de leurs activités de vente de marchandises, d’objets, de fournitures et denrées ou de fourniture de logement et, d’autre part, celui de leurs activités de prestations de services, et, en ce qui concerne les agriculteurs, celui de leurs activités de production. Lorsque, durant deux années consécutives, le chiffre d’affaires de l’entreprenant excède les limites fixées pour ses activités par l’État partie sur le territoire duquel il les exerce, il est tenu, dès le premier jour de l’année suivante et avant la fin du premier trimestre de cette année de respecter toutes les charges et obligations applicables à l’entrepreneur individuel. Dès lors, il perd sa qualité d’entreprenant et ne bénéficie plus de la législation spéciale applicable à l’entreprenant.